«L'éthologie des poissons» - compte rendu de Laurène

Pierre Sigler

Introduction

Sous un angle éthologique, classement du plus évident au plus épatant pendant cette conférence.

Groupe paraphylogénétique = arbre généalogique montrant ancêtre commun et tous ses descendants. Poissons = groupe très diversifié regroupant les lamproies, myxines, animaux sans squelette, dipneustes... Poissons pisciformes tels qu'on les connaît généralement, mais aussi aplatis, serpentiformes, globuleux, et poisson-pierre. Quand deux espèces se distinguent, l'interfécondité se fait progressivement.

On en trouve un peu partout, le record étant à + de 5000m (lacs tibétains) et 8000m sous les mers (au large des philippines). A diverses t° (-10 à +50°). Pendant longtemps on les a peu étudiés (conceptions influencées par la scala natura, échelle des êtres par Aristote avec tout en haut l'humain et en bas les animaux), à cause de leur absence de voix, d'expression faciale, faisant penser à une absence de vie mentale). Il y a un intérêt grandissant pour l'éthologie cognitive des poissons (voir graphique).

Sentience

Expérience où l'on injecte dans la lèvre d'une truite inconsciente soit du venin d'abeille soit du vinaigre, puis on la compare avec une situation normale. On s'aperçoit que la respiration augmente, qu'elle se désintéresse de la nourriture, et que celle qui a reçu du vinaigre compresse sa lèvre contre une paroi. De plus, les blessées évitent moins les objets nouveaux dans leur environnement, car elles sont occupées par leur douleur. Autre étude sur les émotions : 2/3 de l'aquarium est sûr, et dans l'autre tiers on fait des chocs électriques. À côté de la zone électrifiée se trouve un autre aquarium. S'il est vide, la truite ne vient pas dans la zone. S'il y a une truite dedans, l'autre truite préférera subir les chocs électriques pour être près d'une congénère. Les poissons rouges ne le font pas car ils sont moins grégaires.

Mémoire

Toutes les études montrent que tous les poissons ont de la mémoire (poissons rouges = 3 mois !), peu étonnant quand on sait l'importance de la mémoire pour la survie. Ils utilisent toutes sortes d'indices pour capter leur environnement (courants marins, récepteurs sensoriels...). Les poissons utilisent-ils des souvenirs relatifs ou des indices absolus ? Construction d'un labyrinthe symétrique. Nourriture à gauche et le poisson apprend dans cette partie à trouver la nourriture. On retourne le labyrinthe de 180° donc position relative inversée mais même position absolue dans la pièce où se trouve le labyrinthe. Certains se trompent puis changent de stratégie, certains trouvent tout de suite. Cas très connu des saumons qui retrouvent à l'odeur leur rivière natale pour pondre.

Expérience fascinante sur la mémoire spatiale : marée basse = flaques = poissons piégés. Si danger oiseau, sautent dans flaque adjacente. Marée haute : ils mémorisent la topographie des lieux et devinent quels endroits seront remplis d'eau et d'où ils pourront sauter avec le bon angle et la bonne vitesse. On a essayé de capturer un poisson et de le relâcher beaucoup plus loin, et on a vu qu'ils retrouvaient leur nid à + de 22 km de distance parfois ! Dans une variante on les a gardés en captivité 6 mois pour ensuite les relâcher à 20 km de leur habitation, et ils ont retrouvé leur chemin. Souvenir peut être contextualisé selon les heures aussi (attendre la nourriture à une heure précise par exemple).

Personnalités

Conception courante comme quoi tous les poissons seraient interchangeables. Éthologues ont proposé plusieurs méthodes pour appréhender les différences entre les individus. Timidité/hardiesse (propension à s'approcher d'un objet nouveau) : au fil des études, chaque individu poisson semble régulier dans sa façon d'agir. Proactif/réactif, syndrome comportemental (tendance des corrélations entre différents traits de caractère, par exemple hardiesse+curiosité). Un trait désavantageux dans certains contextes ne l'est pas dans d'autres.

Reconnaissance individuelle

Tous les poissons reconnaissent leurs congénères individuellement. Beaucoup sont des individus sociaux qui vivent dans des groupes stables où chacun se connaît. Souvent les parents s'occupent à deux de leurs petits. Peuvent reconnaître la voix, mais en général c'est surtout l'odeur qu'ils utilisent. Ils préfèrent ceux qui ont une odeur similaire à la leur (famille mais aussi environnement, ou alimentation...). Préférence aussi selon personnalité (sur la base des comportements antérieurs).

Apprentissage Social et réseaux sociaux

Nombre important d'interactions + nage souvent ensemble (schooling) = on peut dire que les deux individus poissons se connaissent, se fréquentent. Le comportement anti-prédateurs : les poissons apprennent beaucoup de leurs congénères. Ils communiquent au banc entier le niveau de la menace, les autres arrêtent alors de bouger ou se cachent. Changement du comportement si un congénère arrive d'un endroit riche en prédateurs, autrement non. Migration et orientation : peuvent apprendre aussi comment s'orienter. Lieux de reproduction identiques à génération précédente, bien souvent. Décrits comme assez conformistes et gardent les habitudes des autres par tradition. Choix du partenaire : les poissons sont plus attirés par les poissons séduits par un tiers. Statut social : expériences avec des poissons qui défendent farouchement leur territoire pendant la ponte. Inférence transitive = on observe que A>B et B>C, alors A>C. Les poissons peuvent-ils faire cette expérience logique ? Pendant 11 jours, l'observateur voit des poissons se battre deux par deux. Puis les deux poissons aux extrémités de la chaîne de combats sont mis en communication avec l'observateur, qui choisit d'aller vers les moins forts.

Coopération

Réciprocité : un poisson est altruiste avec un autre en s'attendant à ce que l'autre en fasse de même. Les poissons ne prennent pas de risque si leurs congénères ne le font pas. Intelligence machiavélienne : dans les récifs coralliens, poissons proposent à d'autres de leur faire la toilette (nettoyage buccal, dentaire, corporel), mais aussi massages. Taux de cortisol plus bas dans le sang des poissons massés. Machiavélisme car les poissons laveurs choisissent leurs clients parmi ceux qui ont du mucus. On pense que leurs ancêtres étaient des parasites consommateurs de mucus. Mais les clients n'aiment pas trop qu'on leur mange le mucus. 3 sortes de clients : les prédateurs (peuvent manger le labre si pas contents, donc le labre ne mange pas le mucus), les résidents (se déplacent peu donc une seule station de nettoyage : punir le nettoyeur si pas contents du service) et enfin les visiteurs (poissons qui naviguent beaucoup, beaucoup de concurrence, relations avec les visiteurs = complexes. Meilleur service aux poissons habitués qu'à ceux de passage, inconnus. Lorsqu'un labre toilette un poisson, le suivant observe. Le poisson nettoyeur serait sensible au fait de donner une bonne image. Le service est d'ailleurs meilleur lorsqu'ils sont observés. Mais différence selon qui est l'observateur. Aléas de la vie conjugale : deviennent mâle quand sont assez gros et forts pour gérer un harem. Équipe de nettoyage : si une femelle triche, le mâle va la chasser. Quand une femelle non familière arrive sur un nouveau territoire, les femelles veulent la chasser, alors que les mâles non, car cela leur fera une femelle en +. Chasse coopérative : chasse entre espèces différentes comme mérou (vitesse) et anguille (embuscade). Quand proie du mérou se réfugie dans un corail, mérou va chercher de l'aide vers l'anguille qui va le suivre et chercher la proie car elle est plus agile. Des fois le duo se forme dès le début.

Ainsi, pour ce qui est des capacités mentales, pas lieu de faire des différences entre poissons et vertébrés terrestres. Mais on n'en est qu'au début des études sur les poissons, ainsi, peu de données sur les mécanismes psychologiques pour le moment.