«La communication efficiente» - compte rendu de Thomas

Conférence par Isabelle Dudouet-Bercegeay

Dimanche 4 août 2013 à 13h

40 personnes présentes

Efficient = efficace par rapport aux ressources investies.

Introduction

Nous aborderons les freins généraux à la communication. Nous nous demanderons aussi pourquoi certaines personnes conscientes sur le plan éthique continuent de consommer des produits animaux.

Les freins à la communication

Les mots que nous utilisons représentent environ 20 % de ce qui est communiqué, la voix 30 %, le corps et la gestuelle 50 %.

Les freins liés à l'interlocuteur :

Ce qu'il écoute ? ce qu'il en comprend ? ce qu'il en accepte ? ce qu'il retient

Les 4 types de « personnalité » (« préférences cérébrales »), à prendre en compte lors des échanges pour adapter son discours :
Le rationnel : Est intéressé par les chiffres, faits, données, informations brèves, précises et claires, veut savoir comment les choses fonctionnent. Rationnel, logique, réaliste.
Le prudent : Aime la précision, les choses pratiques. Organisé, planifie dans le détail (besoin d'étapes). Aime les règles et les procédures. N'aime pas les digressions, déteste l'urgence, aime la ponctualité. (Proposer un accompagnement dans le changement)
Le sensible : Extraverti, pas d'intention non déclarée (dit les choses telles qu'il les pense), aime les contacts humains, les histoires personnelles, l'humour. Fait preuve d'empathie, mesure les effets de son existence sur les autres, écoute et comprend, émotif, ressent.
L'expérimental : Intuitif, aime faire de nouvelles expériences, curieux, désobéit aux règles, stratégies à long terme (guidé par la finalité), prend des risques, joie. Créatif, drôle, imaginatif. Préfère les métaphores, les concepts, les vues d'ensemble, la philosophie, ouvert, a l'esprit de synthèse, moins peur du changement.

On aurait un type prédominant et un type secondaire qui formeraient ensemble notre personnalité.

Aides à la communication.

Faire preuve d'empathie est essentiel : l'empathie permet de créer un climat de confiance, voire de connivence... Le discours passera mieux en adoptant une attitude ouverte, calme et posée...

Il faut faire l'effort de comprendre l'autre, de le regarder avec bienveillance, de lui laisser son espace vital. Faire des gestes ouverts, sourire (« je suis bien dans ma peau, je suis bien avec vous »). Le non-verbal parle plus vite que les mots : éviter de se tenir assis, courbé, ne pas croiser les bras, etc... être souriant, frais, dynamique.

Garder en tête qu'il faut, avant de pouvoir intégrer une information, y être confronté plusieurs fois (sept fois en moyenne).

Personnalités « faciles » du point de vue de la communication :
Ouvertes
Qui parlent facilement : l'écoute de ces personnes permet d'identifier plus rapidement à leurs besoins et d'y répondre de façon plus adaptée à cette personne, de gagner du temps en entrant beaucoup plus vite en communication.

Personnalités de blocage :
Ironiques : peut être moyen de défense, plus positif que l'indifférence (cf. infra)
Fermées : ne répondent pas aux questions
Fermées : ne parlent pas
Béni oui-oui : les plus difficiles : disent oui mais ne changent pas

Freins/Aides à la communication.
parler de soi au lieu d'être à l'écoute de l'autre : meilleur moyen pour rompre la communication.
outils : écouter vraiment (difficile)

Les personnes conscientes mais qui ne mettent pas en acte ses convictions éthiques : comment réagir en face de cette situation ?

Implique d'explorer :
psychologie :
remise en question personnelle
conflit de loyauté envers les parents (concerne beaucoup de personnes)
déni pour se protéger
peurs d'exclusion
plaisir :
le plaisir gustatif et la convivialité
difficulté de changer ses habitudes
la vie sociale
peur irrationnelle de perdre sa virilité...
croyances :
idées reçues concernant la santé

On peut avoir des leviers d'action sur chacun de ses points (ex. repas conviviaux...).

Parler de santé, de l'environnement, du partage des ressources, de convivialité, peut permettre de contourner l'obstacle « conflit de loyauté » ou d'autres obstacles, et ainsi aider la cause des animaux. Insister d'abord sur un argument qui n'entraîne pas de remise en cause personnelle sur le plan éthique permet à la personne de déjà changer ses habitudes, puis par la suite d'avancer sur la réflexion personnelle éthique.

Même une personne qui ne va pas au bout de la démarche nous aide car démontre à son entourage qu'on peut ne pas manger de viande ou de poisson à chaque repas.

Frein de la remise en question personnelle : « Renoncer à la viande et aux autres produits animaux parce que l'on a pris conscience de la souffrance que cette exploitation induisait dans le monde animal, c'est s'accuser de toute la souffrance que l'on a infligée aux animaux jusqu'au moment de cette décision. Pour ne pas s'accuser, et dissimuler qu'il s'agit d'un crime, la solution choisie est donc souvent de ne rien changer aux comportements d'exploitation animale. » (« Psychologie sociale du crime » de Philippe Laporte). Exemple inter-humain : l'excision, qui continue d'être soutenue par des femmes concernées envers leur fille car le contraire serait une remise en question insupportable à l'égard de leur propre mère.
Même s'il n'y a aucune remise en cause explicite lorsqu'un membre d'une famille devient végé, c'est bien souvent vécu de cette façon, et peut entraîner des conflits familiaux importants.

Donc il peut y avoir nécessité de passer par un alibi neutre, moins impliquant.
Chez les femmes, souvent alibi neutre « bénéfice pour la santé », chez les hommes souvent « bénéfice pour l'environnement ».

Cela se passe comme si certaines personnes avaient besoin d'alibi (santé, environnement) afin de ne pas se remettre en question et de ne pas remettre en cause l'éducation parentale : avoir mis à mort des animaux sans nécessité.

Intuitivement nous savons que nos parents ne pouvaient pas ignorer qu'il y a mise à mort des animaux pour les manger (et grands-parents) ; donc conflit de loyauté +++ ; en revanche intuitivement il est facilement concevable que nos parents ignoraient les impacts de la consommation de produits animaux pour l'environnement et la santé.

Conséquence pour les militants : Importance devant ces personnes d'une situation d'ouverture, d'éviter toute culpabilisation (sachant que pour certain, être en face d'un-e végé est déjà ressenti comme une culpabilisation).

Remarque : Plus on est informé, moins on agit ; les gens cessent de s'intéresser à un problème s'il n'y a pas de solution facile ; donc solution : créer des actions de communication qui montrent la gravité des problèmes, tout en montrant les solutions viables, accessibles, existantes (Article dans l’'Écologiste : « Comment peut-on être indifférent ? »)

Le déni

Inconscient.
Personne convaincue sur le plan éthique, mais :
pas de solution perçue...
donc si je me voile la face il n'y a plus de problème...
donc je peux continuer de vivre en insouciance.

Peur de l'exclusion sociale, de sortir de la norme

Seule 1 français sur 10 choisie son alimentation en fonction de l'éthique (animale et environnement), 7 sur 10 en fonction du plaisir gustatif (sondage Quotidien du médecin)
Pour les autres : difficulté à sortir de sa zone de confort.

Peur de l'exclusion familiale, du risque de rupture familiale

Rappel : plus facile dans ce cas d'expliquer à sa famille son végétarisme sur des arguments non-éthiques.

La vie professionnelle

La société inculque que les animaux prédateurs sont supérieurs aux autres, ils sont valorisés, les proies dévalorisées. Certaines professions sont dans une optique de compétition (milieux d'affaires, de la vente...). Si l'on est dans un tel milieu professionnel, afficher son végétarisme peut être source de problème. Là aussi, les alibi santé ou environnement permettent de contourner les problèmes...

Peur de renoncer à sa virilité

Intéressant d'insister sur les sportifs végé.

Censure sociale

En Français et en Philosophie, il y a une censure concernant certains auteurs ou philosophes, ou certaines de leurs positions concernant les animaux : Voltaire, Lamartine, de Vinci, Hugo, etc.
Au contraire, valorisation des repas carnés via l'étude de Pantagruel.

Plaisir gustatif et convivialité

« VG = frustrations = déplaisir » :
VG = pas rassasiant = frustration
VG = salade verte et haricots = régime = frustration
VG = pas de convivialité car partager un bon repas c'est forcément avec viande = frustration
VG = cuisine compliquée
VG = gens tristes

« Vous pouvez avoir un très très bon produit, si l'emballage n'est pas joli vous ne le vendrez pas... » donc importance d'insister sur l'image du végéta*isme pour casser l'image de frustration.

(Idée de réponse : « Oui, moi aussi j'aimais la viande, par contre je n'aimais pas manger des animaux, et maintenant je trouve mon plaisir gustatif autrement »).

Difficulté de changer ses habitudes

« On mange de la viande depuis la nuit des temps »...

Tout changement d'habitude demande un effort important,
Plus un changement est perçu comme important, plus on court le risque que l'effort nécessaire ne soit pas fourni,
La personne cherche donc à se maintenir en zone de confort (ne pas changer) afin d'éviter du déplaisir.

Ceci dit, nous même sommes devenus végétariens afin de rester dans notre zone de confort ! Un jour il nous est devenu plus facile de devenir végé que de continuer à ne pas l'être... Même processus, simplement les critères ne sont pas les mêmes.

Donc importance de véhiculer une image de simplicité pour le végétarisme, afin de réduire les freins au changement.

La vie sociale

Il pourrait être intéressant de communiquer sur la vie sociale préservée même si on est végé.

Remarque : si le choix vient de soi, et pas d'une culpabilisation de l'entourage végé, le risque d'arrêt du végétarisme et d'alibi fallacieux est réduit.

Les idées reçues concernant la santé

D'où peur : je ne change rien même si j'en ai envie.

Manque de protéines, carences, fatigue, nous sommes faits pour être carnivores...

Réponse aux constats de carence chez certains : Les carences en fer, la fatigue, etc., ne sont pas spécifiques du végétarisme, et les études montrent qu'il n'y a pas plus de carences en fer chez les végés que chez les non-végés, mais ça ne veut pas dire qu'il n'y en a pas ; et il y a bien d'autres causes de fatigues que le végétarisme. Donc à explorer : thé/café/produits laitiers ? Pas de sources de vitamine C ?

20 % des français choisissent leur alimentation par rapport aux bienfaits santé. Donc plus les végétariens sont visibles, plus ça baisse les freins représentés par les a priori sur la santé.

Annexe : le végé refoulé : « J'aime trop le steak »

Par expérience, plus une personne est provocante dans le choix de ses mots (« J'aime trop la viande » (si dit sur le ton de la provocation, mais il peut s'agir d'un questionnement sincère). « Tu ne sais pas ce que tu rates... »), plus il est probable qu'il s'agisse d'un-e végé-e refoulé-e.

Il est possible de l'amener à accepter le fait qu'au fond il-elle n'aime pas le fait de manger les animaux... Aimer le goût de la viande n'est pas la même chose que d'aimer manger les animaux.

Réponse possible : « C'est votre choix que d'aimer manger les animaux, mais ce n'est pas mon choix ». Reformulation sans culpabilisation et en reconnaissant leur possibilité de choix. En général bonne entame pour le dialogue.

Faire attention de ne pas s'engager dans la contre-argumentation avec le végé refoulé ! La plupart du temps perte de temps. Il est plus efficace d'aller vers les sentiments, l'empathie.

(Il s'agit d'une situation plus facile d'un point de vue militant que le discours « je respecte tout à fait tes positions mais... ».)

Astuces diverses lors des échanges

Toujours adapter le changement en fonction de son interlocuteur (difficile dans les médias, mais on connaît parfois le type d'audience ; sur les stands implique d'être à l'écoute)

Mettre les « pourquoi » à la fin de phrase et non au début.

Sémantique « non-végétariens » (pas omnivore ou carnivore, sous-entend que le végétarisme est la norme, inverse le rapport), « aimer manger les animaux... ».

Il est important de donner aux gens les outils pour franchir le cap : recettes, accompagnement, Guide du végétarien débutant (AVF), ateliers cuisine... tout ce qui répond à « comment je fais ? ».

Faire des pauses : facilite la mémorisation.

Conclusion

S'adapter aux différentes personnalités et aux réactions.

Écouter +++ : plus il parle, plus il sera enclin à écouter si en rapport avec ses préoccupations.

Empathie +++, s'intéresser, accepter la vision de l'autre en se mettant à sa place. Comprendre les freins pour la personne, éviter les généralités.

Il n'y a pas de vérité, ce qui compte ce n'est pas ce que nous pensons du végétarisme, mais ce que l'autre pense du végétarisme.

Pas de jugement de valeur ! Ne pas dire « c'est cruel, atroce » etc., mais simplement décrire les conditions de vie des animaux, décrire la réalité (qui est de toute façon atroce), et laisser autrui en tirer ses propres conclusions.

Truc : « Je ne m'étendrais pas sur les conditions d'élevage, vous les connaissez : (énumérer rapidement) » : évite le rejet tout en rappelant ces conditions.

Identifier et reconnaître les besoins non formulés... et partir de ces besoins. Premier besoin : que l'on m'écoute. Autres besoins qui peuvent être formulés : D'avoir une vie pas triste, une vie sociale riche, etc., etc. Et à partir de là on peut proposer une alternative adaptée à ces besoins.