Renan Larue - Le végétarisme dans la France des Lumières (XVIIIe siècle): l'exemple de Voltaire et de Rousseau

Résumé de la communication

Dans la France du XVIIIe siècle, le « régime de Pythagore » jouit d’un regain d’intérêt parmi les naturalistes, des juristes et les écrivains. Plusieurs phénomènes expliquent ce renouveau : les progrès de la médecine, le rejet du luxe gastronomique, la déroute de la théorie des animaux-machines mais aussi et surtout le déplacement du seuil des sensibilités. Les populations, qui deviennent en effet plus sensibles à la souffrance animale, s’interrogent sur les fondements moraux et religieux de la consommation de viande. Ces réflexions sont présentes aussi chez des auteurs de tout premier plan, tels que Voltaire et Jean-Jacques Rousseau. Le premier fait découler son végétarisme de ce qu’il faut bien appeler un antispécisme avant la lettre. Il comprend aussi que l’exaltation de l’éthique végétarienne sert son combat contre l’Église. Le second entreprend de démontrer que notre nature – physiologique et psychologique – est celle des frugivores ; le romancier qu’il est fait de son personnage emblématique, Julie de Wolmar, une végétarienne ; enfin, quarante ans avant Bentham (et de manière plus décisive que lui), Rousseau jette les bases de l’éthique animale moderne.

Contrairement à une idée communément admise, le mouvement actuel de libération animale doit donc être envisagé comme l’héritier de la philosophie des Lumières.

Éléments biographiques

Renan Larue est agrégé et docteur en lettres modernes. Il est depuis quelques semaines assistant professor à l’Université de Californie – Santa Barbara, où il enseigne notamment la littérature française du XVIIIe siècle.

Il est l’auteur en 2014 d’une petite anthologie des textes que Voltaire a consacrés au végétarisme (Fayard/Mille et une nuits). Il a également fait paraître il y a quelques mois, aux Presses Universitaires de France, Le Végétarisme et ses ennemis. Vingt-cinq siècle de débats. Ce dernier livre retrace la querelle qui oppose les carnistes aux végétariens/véganes, depuis l’Antiquité jusqu’aujourd’hui.